Réconciliation, la preuve par quatre en Côte d’Ivoire

Article : Réconciliation, la preuve par quatre en Côte d’Ivoire
Crédit:
25 décembre 2013

Réconciliation, la preuve par quatre en Côte d’Ivoire

Il n’y a pas lieu de polémiquer sur une sorte de réconciliation arrangée entre les Ivoiriens. Cela fait près de cinq mois maintenant que beaucoup de choses ont changé dans le microcosme politique en Côte d’Ivoire. Donnant ainsi une lueur d’espoir aux uns et aux autres en cette fin d’année 2013.

Ce n’est pas de la poudre aux yeux. Loin de vouloir ressasser les douleurs du passé, l’entêtement de l’ex-président Gbagbo à ne pas céder le fauteuil au soir du 28 novembre 2010, a inévitablement plongé la Côte d’Ivoire dans le chaos. La société ivoirienne fracturée par une décennie de crise a basculé dans la violence extrême. Au point où ceux qui tenaient les discours venimeux avant la chute de leur mentor ont préféré prendre la poudre d’escampette. D’autres par contre, sont restés cloitrés dans le bunker du « messie de Mama » jusqu’à sa « capture ».

Dès lors, on assistera à l’arrestation de plusieurs dignitaires de l’ex-Refondation. Histoire de les mettre sous l’éteignoir, en attendant de mettre de l’ordre au sommet de l’Etat. Après avoir traversé une situation extrêmement difficile, la Côte d’Ivoire a commencé à se relever avec la prise de fonction du président Alassane Ouattara. Le nouveau chef de l’Etat, après son investiture le 21 mai 2011 à Yamoussoukro, la capitale politique, a procédé à la création de la Commission dialogue vérité réconciliation (CDVR) en prenant l’ordonnance n° 2011-167 du 13 juillet 2011. Le faisant, il a à cœur de faire table rase sur le passé. Et dans cette perspective, il a pris une kyrielle de décisions pour apaiser l’environnement politique en Eburnie.

Le président de la CDVR, à l’extrême droite, remettant le rapport de son travail au président de la République, à l’extrême gauche. Ph: DR
Le président de la CDVR, à droite, remettant le rapport de son travail au président de la République, à gauche. Ph: DR

Libération des prisonniers politiques

Mais quels sont ceux qui devraient se réconcilier, quand on sait qu’il y a deux camps opposés ? D’une part, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) composé de quatre partis politiques et d’autre part, l’ex-Majorité présidentielle avec à sa tête le Front populaire ivoirien (FPI). Un parti, sans lequel, à en croire des observateurs de la scène politique, il ne pourrait avoir de réconciliation.

Ainsi, pour décrisper l’atmosphère, le chef de l’Etat, au nom de la paix entre les filles et fils du pays, avait décidé la libération d’une vingtaine de prisonniers pro-Gbagbo, avant la tenue des législatives du 11 décembre 2011 que le FPI avait boycottées. Dehors, ces derniers vaquaient librement à leurs occupations.

Plusieurs autres détenus, dont Michel Gbagbo, fils de l’ex-président et son ex-premier ministre Gilbert Marie Aké N’gbo, eux, fumeront l’air frais de la liberté en décembre 2012. Mais, le grand « coup de la République » va s’opérer à deux jours du 53e anniversaire de la Côte d’Ivoire. Le 5 août 2013, le procureur de la République annonce la mise en liberté provisoire de douze détenus politiques proches de Laurent Gbagbo. Au nombre de ceux-ci, des responsables de premier plan de la direction nationale du FPI, dont son président Affi N’Guessan, le vice-président Aboudrahamane Sangaré, le secrétaire général adjoint Lida Kouassi Moïse, le secrétaire national Douati Alphonse et le secrétaire national par intérim de la jeunesse du FPI Koua Justin.

La joie au FPI…

Michel Gbagbo, le fils de son père, accueilli en triomphe, au lendemain de sa libération, par les militants du FPI. Ph: DR
Michel Gbagbo, le fils de son père, accueilli en triomphe, au lendemain de sa libération, par les militants du FPI. Ph : DR

Cette vague de libération a même été accueillie, le même jour, avec joie par une certaine coordination, FPI que dirigerait Assoa Adou, depuis le Ghana. Les frontistes qui s’étaient vu rabougrir au plus profond de leur chair se voyaient ragaillardir par le bâton magique de délivrance du président Ouattara. Un mois après la mise en liberté provisoire de l’ex-pensionnaire de la prison de Bouna, Affi N’Guessan a repris du poil de la bête.

Après avoir été reçu par le premier ministre Daniel Kablan Duncan, le président intérimaire du FPI, Miaka Ouretto lui a passé la main le samedi 7 septembre 2013. Et ce jour, les premiers mots du fils de Bongouanou, sans daigner se remémorer de la grave crise, a craché sa rage sur le pouvoir. Dans un discours de 40 minutes chrono, le président statutaire du FPI a fait le procès du régime Ouattara. Dans son QG de la Riviera Attoban, Affi s’est exprimé en toute liberté démocratique, sans qu’aucune mouche ne le pique. Alors qu’il était en rupture de ban avec la réalité du terrain, l’homme n’a pas manqué de dire que « depuis l’arrivée de Alassane Ouattara au pouvoir, la Côte d’Ivoire ‘’se désagrège’’ au jour le jour, elle ‘’va mal, elle tombe en ruines sous nos yeux’’ ».

Affi et ses ‘’tournées présidentielles’’

Le président du FPI, Affi N'guessan, accueilli pendant une tournée dans la région de Bondoukou. Ph: DR
Le président du FPI, Affi N’guessan, accueilli pendant une tournée dans la région de Bondoukou. Ph : DR

Comme pour dire qu’il n’avait plus peur de rien, Affi a entrepris une tournée à l’intérieur du pays. En roue libre, le cortège du nouveau patron de la refondation s’est ébranlé pour le Moronou, le 10 septembre. En partance pour sa région, l’ex-prisonnier de Bouna, au lieu d’être accueilli par des pierres a plutôt été happé par les populations Attié, depuis Azaguié jusqu’à Agbahou, en passant par Miadzin, Moapé, Ananguié et Ahouabo.

Affi a sûrement été surpris de l’accueil de la communauté musulmane de ‘’dioulakro’’, un quartier malinké de Bongouanou, à son arrivée. « Il y a eu des événements spontanés et incontrôlés ici à Bongouanou, mais en partant, sache que tu as des parents ici. Nous sommes là aujourd’hui, nous serons là demain. N’hésite pas à nous informer chaque fois que tu auras besoin de nous », rassurait en substance l’imam Traoré de la mosquée.

Toujours dans la quiétude, Affi N’Guessan a continué sa randonnée les 3, 4, 5 et 6 octobre derniers dans la région de son mentor, le Gôh, sans que le ciel ne lui tombe sur la tête. Hormis l’étape d’Oumé, Pascal Affi N’Guessan a animé des meetings à Ouragahio, Guibéroua, Gnagbodougnoa et Diégonéfla. N’ayant fait l’objet d’aucune attaque en route, le président du FPI a continué son périple vers l’Ouest. Du 9 novembre au 20 novembre, il s’est rendu à Bangolo, Duékoué, Toulépleu et Guiglo, étape, où Affi N’Guessan n’a pas eu la langue dans la poche. Il s’est permis d’attaquer la gestion du pouvoir d’Etat par le régime Ouattara.

Injures et diatribes à la bouche !

« Ouattara est fini. Il n’a plus de cartouches. C’est pourquoi, ses hommes et lui font ce qu’ils font, c’est-à-dire user de la violence pour se donner encore un peu de contenance. Ils n’ont aucun plan, aucune stratégie, aucun programme pour les Ivoiriens », avait-il clamé haut et fort, avant de rentrer sain et sauf à Abidjan. De retour, le président du FPI va organiser donc sa première conférence avec la presse nationale et internationale. Au cours de laquelle, il reconnaît que sa vie n’était pas en danger lors de ses tournées.

Le mercredi  décembre, il s’est gonflé à bloc pendant plus de trois heures d’horloge. Encore une fois, Affi a traité le président Ouattara et le gouvernement dans son ensemble de tous les péchés d’Israël. Allant jusqu’à proférer des menaces. « Si Ouattara ne fait pas les Etats généraux de la République, il sera à la CPI », a-t-il dit avant de se braquer contre les autorités. « Dans ma tête, je ne me sens pas concerné par cette mesure de liberté provisoire. Ils peuvent venir encore m’arrêter et puis me jeter en prison ». Ne s’arrêtant pas en si bon chemin, le frontiste en chef va lancer des flèches contre le chef de l’Etat.

Un  « ultimatum » à Ouattara…

« Le temps que nous avons passé en prison est proportionnel à l’incapacité de Ouattara à maîtriser la situation. Il pensait qu’au bout de trois mois, tout le monde allait se coucher à son passage  et que des délégations entières déferleraient des villages et des campements comme au temps de Houphouët, pour venir lui faire allégeance. C’est pourquoi, rappelle Affi N’Guessan, je ne me sens pas concerné par cette mesure. (…) ceux qui pensent qu’à cause de la liberté provisoire, nous allons changer d’attitude, qu’ils se détrompent ».

Première conférence de presse de Affi N'guessan, au siège du FPI, le 04 décembre 2013. Ph: FBI
Première conférence de presse de Affi N’guessan, au siège du FPI, le 04 décembre 2013. Ph: FBI

Malgré tous ses propos « orduriers » venant de l’actuel leader du FPI, aucune action d’arrestation, ni de brigandage n’a été constatée à son encontre. D’ailleurs, celui qui continue de souffler le chaud, a entrepris une autre tournée dans le Gontougo. Le samedi 14 décembre, Affi N’Guessan s’est déplacé dans la tranquillité, avec toute une délégation à Bondoukou. Où il n’a pas manque pas de récidiver en ces termes : « Le temps de ceux qui nous gouverne est terminé ».

Pendant ce temps, l’ex-prisonnier Koua Justin semble donner de la voix à Abidjan. Se croyant tout permis dorénavant, le tribun a embouché la trompette de son patron Affi N’Guessan, en lançant un ultimatum au régime d’Abidjan. « Si Ouattara refuse le dialogue, s’il refuse les Etats généraux de la République, en 2014, il se verra dans l’obligation d’arrêter toute la direction du FPI. (…) Si jusqu’à la fin du mois de décembre, il n’a pas libéré Simone Gbagbo, Blé Goudé, Jean Yves Dibopieu, en 2014, le FPI va faire en sorte que les choses changent démocratiquement », a martelé le responsable de la JFPI.

A entendre de tels propos venant des personnes issues de l’opposition, s’exprimant en toute liberté, n’y a-t-il pas lieu de s’en convaincre qu’il y a une véritable démocratie en construction en Côte d’Ivoire ? Nonobstant tous ces agissements frisant de la provocation, l’Etat est resté arc-bouté aux valeurs démocratiques sans entreprendre des actions coercitives contre le FPI.

Quand le parti de Gbagbo se fourvoie !

Le Cadre permanent de dialogue (CPD), c’est la plateforme de discussion qui a été mise en place, entre le pouvoir et 11 partis de l’opposition, en avril 2012, à Grand-Bassam. Mais très tôt, le Front populaire ivoirien (FPI), dans sa logique de tout bloquer, s’est démarqué du groupe. Après des concessions faites par le gouvernement notamment la libération de plusieurs prisonniers pro-Gbagbo, les frontistes ont retroussé leurs manches depuis la libération de leur nouveau mentor. Affi N’Guessan qui se plaît à effectuer des tournées ‘’présidentielles’’, à l’image du trône qu’il porte, à jeté son dévolu sur ce qu’il appelle les ‘’Etats généraux de la République’’. Qui, selon lui, devrait permettre d’aboutir à la réconciliation nationale.

Et pourtant, l’homme oublie qu’il n’avait pas la possibilité de voler comme un oiseau aujourd’hui, il y a vingt-huit mois avant. Comme l’a si bien dit le député Sié Coulibaly, président de Initiative libérale de Côte d’Ivoire (ILCI), « Si Affi N’Guessan s’exprime librement, s’il voyage à sa guise aujourd’hui, c’est parce que le président Ouattara a permis un cadre ». Selon lui, la réconciliation nationale conduite par le premier ministre Charles Konan Banny est en train de faire ses effets. Cela dit, ceux qui pensent vouloir faire du chantage sur le retour de la paix en Côte d’Ivoire devraient se raviser.

Aux yeux du monde entier, le président Ouattara continue de tendre la main à ses détracteurs. Après avoir encouragé la rencontre FPI-RDR, il a annoncé que l’opposition devrait rejoindre le gouvernement bientôt. « J’encourage le FPI à continuer le dialogue », invite-t-il, avant de révéler, qu’il a « de très bonnes nouvelles pour les Ivoiriens » en fin d’année 2013. Des signaux forts qui montrent clairement que le train de la réconciliation a atteint sa vitesse de croisière. Et qui ne veut pas l’admettre risquerait de « disparaître », au dire de Ouattara.

FBIYAY

Partagez

Commentaires

george
Répondre

vraiment les ivoiriens ont la mémoire courte depuis la mort du vieux tout ce qui ce passe en CI est pareille. toutes les actions sont les mêmes (discours,arrestations des opposants, arrestations des journalistes,mauvaise gouvernance, enrichissement d'une minorité au détriment d'une majorité etc...) sauf les hommes politique qui ont changé sinon c'est les mêmes idées. si chacun de nous pouvait mettre de coté ses passions et ouvrir grandement son esprit et tenir un raisonnement logique je pense que les politiciens sauront que nous ne sommes pas dupe.

A.B. Ladji Coulibaly
Répondre

Ha, les politiRiens de la Refondation, à l'évidence ne connaissent rien de la Reconstruction et de la Réconciliation, puisque eux n'ont fait que divisé, harcelé, tué, volé, pillé etc. Alors FBI, quoi d'étonnant qu'un certain AFFI continue ses sorties d'amateur? Comme on dit, le Chien ab...la Caravane passe.

Fofana Baba Idriss
Répondre

Oui, le chien va continuer d’aboyer, et la Côte d’Ivoire poursuivra le chemin du développement… Comment vouloir, sciemment, bloquer la vie d’un pays… pour des bêtises !