En période électorale : être journaliste, blogueur et bon militant…

Article : En période électorale : être journaliste, blogueur et bon militant…
Crédit:
11 octobre 2015

En période électorale : être journaliste, blogueur et bon militant…

S’il est vrai que le journaliste ou le blogueur a besoin de liberté pour s’exprimer, pour informer ; il n’en demeure pas plus vrai qu’il n’y a pas de liberté sans responsabilité. Surtout, en période électorale – sous les tropiques – où le militantisme bat son plein. On assiste à des  »dérives langagières » de part et d’autre selon le média ou le canal utilisé par Pierre ou Paul pour Monsieur Tout-le-Monde. Tout simplement, avec sa plume, on devient le chantre de l’homme politique.

En cette année électorale 2015, plusieurs contrées, notamment africaines dont la Côte d’Ivoire (Présidentielle = 25 octobre), la Centrafrique, le Burkina, la Guinée, etc., et Haïti (Présidentielle = 25 octobre), semblent avoir la même préoccupation : celle d’élire un ou plusieurs dirigeants pour conduire le développement du pays. C’est donc une période charnière où tout peut basculer dans le bon sens ou virer au pire. Alors que l’élection devrait consacrer le changement, l’alternance à la tête de nos pays; l’occasion de cet exercice démocratique se fait toujours dans la douleur, dans les pleurs, dans la tortue et dans la mort… On ne le dira jamais assez ! Ces moments d’élections, sous les tropiques, sont devenus les passages les plus difficiles pour les populations du fait de l’insouciance des hommes. Ceux qui refusent de servir la cause nationale.

Pour ma part, je pense que les travailleurs de la plume, plus spécifiquement les acteurs de l’information que sont les journalistes et les blogueurs, ont un rôle éminemment important à jouer ; non pas en tant que militant de parti politique, mais militant des valeurs universelles, militant de la vérité, véri-fiable… Ces militants de la plume qui ne se contentent pas de la vérité officielle, mais qui chercheront à cerner la réalité au plus près.

Selon « 24heures dans une rédaction », le journaliste est un acteur social, mais il n’est pas un acteur politique au sens commun du terme bien que son rôle social ait un impact politique : « Les valeurs qui forment le socle de son action professionnelle sont les valeurs de l’universalisme : la paix, la démocratie, la liberté, la solidarité, l’égalité, l’éducation, les droits de l’homme, les droits de la femme, les droits de l’enfant, le progrès social, etc. » Cela montre à quel point les écrits du journaliste devraient contribuer aux transformations sociales, politiques, et non servir comme une arme de destruction massive.

Ces images ont fait le tour du monde, à la suite des élections de 2010 en Côte d'Ivoire. Ph: Issouf Sanogo (AFP)
Ces images ont fait le tour du monde, à la suite des élections de 2010 en Côte d’Ivoire. Ph: Issouf Sanogo (AFP)

En Guinée, le sang a commencé à couler dès qu’on a parlé d’élection présidentielle. Et continue de couler à travers des plumes, des écrits. Comme le disait le blogueur, Alimou Sow sur Facebook, le samedi 10 octobre 2015 : « Faire preuve de discernement face à la masse d’informations qui circulent actuellement sur Internet au sujet des événements en Guinée est plus qu’un devoir civique ». Pour lui, « ceux qui colportent de fausses informations, écrivent sur des rumeurs, incitent à la haine et à la division et feignent d’être sourds aux messages de paix entendront tonner dans le Tympan, demain, la redoutable leçon de l’histoire ».

A ce stade, je m’interroge s’il faut prendre au sérieux ou pas les écrits de certains acteurs engagés de la plume sur les réseaux sociaux ? Sur Facebook, il s’avère que chacun est libre de s’exprimer, de dire ce qu’il veut ou pense. D’ailleurs, de nos jours, les grandes déclarations des hommes politiques ou d’hommes d’Etat se font sur les réseaux sociaux avant qu’elles ne soient reprises par et dans les médias traditionnels. Si des journalistes et des blogueurs prennent ces propos pour argent comptant, ne faudrait-il pas prendre en compte leurs propos qu’ils tiennent entre les lignes sur ce même canal ? Sinon, doit-on pratiquer le journalisme dans un organe de presse et faire du militantisme politique sur les réseaux sociaux tout en restant journaliste?

A en croire « 24heures dans une rédaction », si le journaliste milite au nom des valeurs universelles, il ne devrait jamais militer en faveur d’intérêts catégoriels, sectoriels, individuels ou partisans ; sinon il tombe dans la confusion des genres, aliène sa liberté et compromet le crédit de confiance que les lecteurs accrochent à son indépendance. Autrement dit, s’il adhère à un parti politique – ce qui est son droit citoyen – il doit s’interdire de mettre sa fonction au service de son parti et, en particulier, de relayer les prises de son obédience politique.

C’est tout comme le journalisme d’opinion, toujours selon « 24heures dans une rédaction », qui ne fait pas exception à cette règle. « Il arrive souvent que le journaliste militant pour les valeurs de l’humanisme soit conduit à s’opposer ouvertement à un pouvoir qui les bafoue ou les nie. Il le paye, parfois de sa vie ». Non sans souligner que, « même dans les cas de tensions extrêmes, il ne saurait s’affranchir des règles déontologiques qui lui imposent de respecter toutes les convictions, toutes les croyances, toutes les formes d’expressions, y compris celles qui prétendent museler les siennes ». Allez donc comprendre que le journaliste militant, attaché aux valeurs universelles, met un point d’honneur à donner la parole à ses adversaires et à faire preuve de tolérance à leur égard dans ses analyses et ses commentaires.

Contrairement à certaines langues, le journalisme est un métier de la communication, au sens plain du terme. Et Yves Agnès ne croit pas si bien le dire dans son Manuel de Journalisme : « Le Journaliste n’est pas un artiste livrant son œuvre à ceux qui voudront bien l’admirer. Il travaille au service du public. Il n’est pas la source de la nouvelle, il ne fait que la répercuter, que la livrer à d’autres sous forme accessible qui est le langage journalistique ». Pour lui, il n’y a pas d’« exercice illégal » du journalisme comme pour la médecine. On peut donc être un bon « amateur » et écrire occasionnellement dans un journal, voire en éditer un soi-même. Car, nombreux sont les blogueurs qui commentent l’actualité sur leur blog personnel. Savoir informer correctement est donc un métier. Il n’est donc pas prétentieux de sa part en affirmant que le travail journalistique est une « expertise », qui assure l’authentification de la nouvelle.

Les femmes togolaises, toutes en rouge, s’associent à la douleur de leurs sœurs nigérianes. Ph DR
Les femmes togolaises, toutes en rouge, s’associent à la douleur de leurs sœurs nigérianes. Ph DR

Yves Agnès va plus loin dans son ouvrage pour souligner que ‘’le journaliste fait en permanence un travail de création, plus à la manière de l’artisan, qui produit un objet dans un registre déterminé, que de l’artiste ou de l’écrivain qui laissent libre cours à leur spontanéité, à leur imagination’’. Comme pour dire que : «Le journalisme est certes une profession ‘’intellectuelle’’, mais au sens le plus banal du terme : le ‘’produit fini’’ est le résultat d’une démarche intellectuelle et il s’adresse à l’intellect du destinataire, grâce à un savoir-faire ».

C’est pourquoi je suis encore en phase avec les propos de la journaliste Lydia Cacho. Elle est encore plus pertinente, lorsqu’elle lance la célèbre phrase, qui laisse entendre que « le journalisme est un flambeau qui éclaire le monde ». Car, pour elle, un bon journalisme nous permet non seulement de comprendre ce qui se passe dans nos communautés, mais aussi de révéler ce qui empêche le plein respect de nos droits. Cela est d’autant plus vrai qu’il va de soi qu’un journalisme responsable découvre, révèle, éduque et aide à forger l’opinion..

Tous ceux qui pratiquent ce métier, comme Lydia Cacho, devraient alors s’en rendre compte, lorsqu’elle dit que : « Le bon journalisme allume une flamme qui illumine le monde, une flamme qui donne naissance à de nouvelles idées, qui crée des mouvements de solidarité mondiale et sensibilise le plus grand nombre sur la tragédie de la douleur humaine provoquée par les hommes ». C’est aussi ça, la responsabilité des travailleurs de la plume en période électorale. Les journalistes et les blogueurs peuvent éviter des tragédies sanglantes à nos pays en militant pour les valeurs qui doivent faire la fierté de la société humaine, en restant eux-mêmes. A mon humble avis, je dirais qu’écrire ce n’est pas de détruire, mais c’est de construire ; c’est d’apporter quelque chose à l’humanité en bien.

FBI

Partagez

Commentaires

Benjamin Yobouet
Répondre

Totalement d'accord avec toi très cher. Il faut respecter et valoriser notre métier: le journalisme.

Merci pour ce rappel et cet article intéressant !

Fofana Baba Idriss
Répondre

Oui cher frère. Je pense que la seule occasion pour le journaliste de prendre parti, c'est lorsqu'il se trouve dans l’isoloir pour faire le choix d'un quelconque candidat aux élections.
C'est un plaisir pour moi de savoir que ce billet est intéressant... Merci d'être passé sur ce blog.